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L'approche sensorielle

Nous évoquons souvent cette méthode dans la présentation des extraits de plantes proposés sur notre site : ils sont soit fabriqués par nous-mêmes (cas de toutes les teintures mères, des extraits de gemmothérapie, des macérations solaires, des enfleurages, des cosmétiques, de certaines huiles essentielles et hydrolats), soit choisis par nous et achetés auprès de producteurs (huiles essentielles et hydrolats). 
Quelle est la méthode qui nous oriente dans la préparation de nos extraits ou leur choix auprès d’autres producteurs d’huiles essentielles et d’hydrolats?

Approche académique versus approche sensorielle

Le point de vue conventionnel, académique - c’est à dire enseigné dans les universités par exemple - sur les plantes et leurs extraits se focalise sur les composants chimiques. 
Prenons le cas du Thym vulgaire à thuyanol. On dit qu’il s’agit d’un chémotype de Thym vulgaire, pour caractériser cette spécificité facile à comprendre : dans la nature les Thyms vulgaires n’ont en effet pas tous la même odeur ! Ce Thym vulgaire à thuyanol est considéré du seul point de vue de ce constituant : les effets antibactériens, antiviraux, immunostimulants (entre autres...) sont justifiés par la présence de ce composant chimique dominant chez ce Thym vulgaire et présent dans son huile essentielle ou sa teinture mère. 
Un autre exemple est celui de l’Inule aunée, le plus souvent utilisée sous forme de teinture mère : ses propriétés expectorantes et mucolytiques puissantes sont rapportées à la présence de certains composants (non majoritaires) (lactones sesquiterpéniques) auxquels ces propriétés sont attribuées. On sait par ailleurs que l’Inule aunée est un puissant stimulant immunitaire, utile dans des infections virales telles que les grippes.
Pourtant, en présence d’une plante ou d’un extrait, nous pressentons l’existence d’une totalité, d’une unité vivante. Nous comprenons aussi que le point de vue conventionnel, analytique que nous venons d’évoquer nous entraîne à confondre par exemple le Thym vulgaire à thuyanol et la Marjolaine à coquilles, ou plus précisément certains des chémotypes de Marjolaine à coquilles riches en ce constituant. Or il est clair que ce ne sont pas les mêmes plantes ! 
La question se pose donc d’appréhender une plante et ses extraits de manière différente, complémentaire du point de vue conventionnel, d’essayer d’avoir sur une plante un regard qui ne se réduit pas à lui attribuer un nom botanique et à déterminer ses composants chimiques, d’où nous pourrions déduire (avec plus ou moins de précision, vu l’extraordinaire diversité de ces constituants), les propriétés thérapeutiques. 
Un autre chemin de compréhension peut donc être exploré, celui de l’approche sensorielle.

Utiliser le sens olfactif pour rencontrer la plante

La méthode consiste à utiliser nos sens, en premier lieu le sens olfactif. Le sens gustatif peut aussi être impliqué, mais l’expérience montre qu’il a moins de finesse. L’intérêt de l’utilisation du sens de la vue a été compris par Goethe dans ses recherches sur les plantes, mais ne permet pas d’aller bien loin, comme il l’a pressenti vers la fin de sa vie, après que la chimie analytique ait commencé à se développer : il a bien compris qu’une plante s’exprime avec beaucoup de finesse dans son chimisme, plus qu’elle ne peut le faire dans ses formes extérieures. 
En pratique cette méthode consiste en un contact attentif, prolongé, via notre sens olfactif en premier lieu, d’un extrait d’une plante : teinture mère, huile essentielle, extrait de gemmothérapie... 
L’expérience montre que ce contact est possible et que nous pouvons communiquer nos observations, dans le cadre d’expériences en groupe. Cette approche n’est pas facile et requiert un certain entraînement. Ce qui est perçu peut être traduit en métaphores, en descripteurs divers. Il s’agit de lire les effets de l’extrait de la plante sur le corps et sur l’esprit. Bien sûr dans un tel travail d’observation fine nous ne sommes jamais neutres, nous ne sommes pas comparables à des miroirs indifférents, parfaits, qui pourraient refléter la plante dans ses dimensions les plus intimes, les plus complexes. La part des projections personnelles doit donc être évaluée : il s’agit d’une rencontre entre une espèce végétale et nous-même.
 

Que permet l'approche sensorielle?

Cette approche d’un extrait permet de construire une représentation intérieure d’une espèce végétale, d’appréhender son originalité. Il faut souligner que cette représentation n’est jamais complète, que de nouvelles observations permettent de dégager des aspects de la plante qui n’ont pas été vus auparavant. De comprendre par exemple que le Thym vulgaire à thuyanol (pour reprendre l’exemple que nous avons cité ci-dessus) n’est pas la Marjolaine à coquilles...
Cette méthode d’observation est aussi un outil d’évaluation de la qualité des extraits végétaux, sur des critères autres que ceux qui sont généralement utilisés et basés seulement sur des considérations de compositions chimiques.
Toute notre gamme d’extraits est passée à l’épreuve de cette approche, particulièrement les huiles essentielles. Car pour celles-ci les dévoiements sont importants, parmi celles qui sont proposées aux utilisateurs : cultures (sans la moindre remise en question ...) de plantes clonales, distillations dans des alambics de très grande capacité, productions d’huiles essentielles d’espèces végétales cultivées dans des biotopes dont les caractéristiques sont très éloignées de celles de leur milieu naturel, cultures à très grande échelle, pillage des stations de plantes sauvages sans prise en compte de la lenteur de leur croissance...
Des questions analogues se posent pour l’élaboration des teintures mères, des extraits de gemmothérapie, des macérations solaires et des enfleurages. Pour ces extraits de plantes interviennent aussi l’importance du choix de la qualité des excipients utilisés dans les fabrications: alcools, sucre de raisin, huiles végétales...